Belle relation ou bon petit soldat ?
- Anne-Sophie Tréhour
- 16 mai 2017
- 5 min de lecture

Lorsque nous parcourons les commentaires sur les réseaux sociaux ou vidéos équestres certaines remarques reviennent systématiquement : " quelle belle relation" , "quelle belle complicité", ou alors la fameuse question "j'aimerais créer un vrai complicité avec mon cheval, quels exercices je peux travailler pour y arriver ?"
Mais qu'est ce que tout cela veut dire ? qu'est ce que la relation ou la complicité ? Comment le définir ? Quels sont les signes qui en témoignent ? Comment juger une relation ? Comment la développer?
Je m'excuse par avance cet article ne vous apportera que peu de réponses mais, ils vous invitera à réfléchir, je l'espère, sur cette fameuse complicité que nous recherchons tous.
C'est quoi avoir une bonne relation avec son cheval ?

Il est très difficile de répondre à cette question tant l'aspect personnel d'une relation intervient dans ce jugement.
Je vous ai posé la question et voici les mots qui reviennent le plus souvent dans vos réponses : "confiance", "écoute", "respect", "amour", "compréhension", "partenariat" "plaisir", "communication", et voici quelques-unes de vos réponses :
"La relation avec un cheval "ce n'est pas spécialement travailler en liberté ou encore faire de grands numéros avec lui, c'est accepter ses envies et ses "non-envies", l'important est que le cheval nous voit comme un être qui lui apporte amour, confiance, respect...et n'exige rien de lui, le laisse libre d'être lui -même! " Audrey Albert
La relation "c'est lorsque le cavalier est capable d'accepter que le cheval ai ses propres envies et qu'il est capable d'écouter les envies de son cheval en mettant de coté ses envies à lui" Yvan Minguely
"La complicité est basée sur la confiance mutuelle, la compréhension, mais aussi sur une bonne communication et un plaisir commun à être ensemble." Fanny Spanier
Obéissance et relation :
A travers cet article, je voudrais surtout pointer du doigt ce fameux paradoxe qui jalonne le monde du cheval qui est que nous recherchons la relation avec les chevaux mais aussi l'obéissance et la "soumission" aux aides. Ces deux aspects semblent s'opposer au premier abord mais voyons comment trouver un terrain d'entente ou humain et cheval y trouveront leurs comptes.

Avoir un cheval bien éduqué, aux ordres, enchaînant les prouesses techniques ou un cheval en liberté collé à son humain ne se déconnectant jamais, est ce signe de complicité ou simplement un exercice acquis ou un apprentissage bien ficelé ? Pour moi, tout cela est simplement du travail, de l'éducation et cela c'est avant tout du savoir faire qui n'est pas forcément révélateur d'une bonne relation. Bien sur, cela ne veut pas dire non plus qu'un cheval bien éduqué et réalisant tout cela soit soumis et qu'il réalise tout cela sous la contrainte. Et oui tout n'est pas tout noir ou tout blanc et c'est là que cela devient compliqué.
Certains sont très exigeant avec leurs chevaux et peuvent travailler des heures pour que celui-ci réussisse enfin à réaliser telle ou telle chose en oubliant d'écouter leurs chevaux et en étant parfois très dur avec eux. D'autres à l'inverse n'exigent rien et sont même parfois débordés par un cheval de 500 kg qui les bouscule, leur arrache la longe et parfois les menace. Je vous présente ici les deux extrêmes, le noir et le blanc, une éducation "dictatoriale" et une autre manquant parfois seulement de savoir faire ou de savoir être avec les chevaux. Le cheval ne se sent bien ni dans l'un ni dans l'autre. Dans le premier il est soumis et complètement inhibé, dans le second il est livré à lui même et peut se mettre sérieusement en danger et vous mettre en danger. Dans les deux cas la relation telle que nous l'entendons ici, la complicité, semble inexistante.
Comment alors allier travail et relation sans pour autant plonger d'un coté ou de l'autre ?
La relation et la complicité semble se trouver dans un juste milieu, où le cheval est capable d'exprimer ses émotions, ses envies et ses "non-envies" dans un "cadre", sans débordement excessif. Et ou l'humain est capable de mettre de coté ou revoir à la baisse ses envies et ambitions équestres parce qu'il sent qu'aujourd'hui son cheval n'est pas disposé ou pas dans son meilleur jour. C'est ce que j'appelle l'écoute mutuelle.

J'entend déjà certains me dire "oui mais si j’écoute mon cheval il n'a jamais envie de rien faire et ne veut que brouter et roupiller !" "oui mais moi je voudrais faire du haut niveau avec mon cheval et je dois le solliciter sinon je n'arriverais à rien !" Dans le premier cas je répondrais qu'il suffit d'apprendre à motiver son cheval, à être plus intéressant que la touffe d'herbe qui le fait saliver en lui proposant des exercices et activités qui soient motivants en bref mettez du fun dans vos séances ! Et pour ceux qui ont des objectifs plus élevés, je voudrais que vous gardiez en tête de proposer un programme d'entrainement adapté et progressif à votre cheval et surtout que vous n'oubliez pas que le cheval qui a une belle relation avec son cavalier, comprend les choses et a envie de bien faire pour son cavalier sera toujours plus performants qu'un cheval surexploité et déprimé. Et si l'effort est plus intense trouver un bon compromis en lui offrant en échange une récompense gustative, en faisant une pause après un exercice bien exécuté, en lui offrant une séance de grattouilles, un massage, en l’emmenant brouter, ...Offrez à votre cheval une récompense à la hauteur de ses efforts et consacrez autant de temps au travail qu'aux petites attentions du quotidien. Prenez du temps pour soigner votre relation et profiter de votre cheval en étant simplement là pour lui. Placer la relation avant toute chose !
Et c'est sans doute là que se trouve la différence entre être un "boss" et un "leader" ! Le "boss" impose alors que le "leader" propose et essaie de faire en sorte que le cheval y trouve un certain intérêt. Tel est en tout cas ma manière de voir les choses lorsque j'aborde le travail avec un cheval.
Paramètres influençant la qualité de la relation
Pour conclure, je dirais que de nombreux paramètres influencent la qualité de la relation et donc la complicité entre homme et cheval, en voici quelques uns :
- le tempérament du cheval mais aussi de son humain: Un cheval de nature stressé et inquiet avec un humain plutôt compétiteur, un cheval au tempérament de guerrier avec un humain un peu craintif ... ne sont pas forcément des alliances à privilégier et la relation sera plus difficile à créer si l'humain n'est pas en adéquation avec son cheval et inversement.
- l'histoire du cheval et ses interactions passés avec l'humain : Il est évident qu'un cheval qui n'a jamais été trahis par l'humain sera plus enclin à partager des choses avec celui-ci. A l'inverse un cheval surexploité ou abusé par l'humain ou tout simplement un cheval maltraité, aura plus de difficulté à faire confiance et à tisser des liens avec un humain.
- le savoir faire de l'humain et ses connaissances : je suis persuadé qu'il ne peut y avoir de relation sans réel connaissance du cheval, de sa nature profonde, ne serait ce que pour comprendre ses réactions et respecter ses besoin primaires.
- le respect des besoins du cheval : contact sociaux, liberté, nourriture adaptée, absence de souffrances ...

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